La ville de Ghadamès est l’un des plus grands chefs-d’œuvre architecturaux du Sahara et un exemple très particulier d’aménagement de l’environnement. Elle est située à 600 km au sud-ouest de Tripoli, au cœur de la Tripolitaine, région aride de la Libye. Les murs blancs et ocres de cette ville bordée de palmiers semblaient incongrus.
Le nom de Ghadamès est connu depuis au moins deux mille ans, mais sa structure compacte actuelle a été développée par les Arabes musulmans au VIIe siècle, après quoi elle s’est agrandie au fil des siècles.

Parfaitement conçue pour lutter contre les vents du désert et le climat rigoureux du Sahara septentrional, cette ville-oasis, classée au patrimoine mondial de l’Unesco et surnommée « la perle du désert », est l’un des plus grands chefs-d’œuvre architecturaux du Sahara et un exemple très particulier d’aménagement de l’environnement.
Avec des températures atteignant plus de 40°C (elles culminent à 55°C en été et descendent en dessous de zéro en hiver), elle plonge dans le labyrinthe de passages sombres et ombragés. L’idée derrière les passages incurvés est d’empêcher les rafales de sable du désert de souffler à travers le bâtiment. »
La ville de Ghadamès est parfaitement adaptée au climat rigoureux du Sahara septentrional. Les murs intérieurs, qui brillaient d’un blanc éclatant grâce à une couche protectrice de chaux, étaient faits de briques de boue séchées au soleil. Ce mélange d’argile, de sable et de paille se superposait avec des pierres qui les isolaient de l’humidité.
Pour la petite histoire…

Les marchés aux esclaves se sont tenus sur les places à arcades de la ville jusqu’au XIXe siècle. En effet, c’est ce commerce séculaire d’hommes, de femmes et d’enfants subsahariens qui, honteusement, a été à l’origine de l’apogée économique de la ville – et qui a finalement entraîné sa chute après l’abolition de cette pratique au XIXe siècle.
Mais bien avant sa disparition, ce carrefour caravanier avait connu un essor spectaculaire en tant que plaque tournante des commerçants itinérants qui échangeaient des marchandises exotiques telles que des plumes d’autruche, de l’or, de l’ivoire, de la civette, du laiton et de l’étain, ainsi que des armes et des chevaux.
Ghadamès occupe une position stratégique à la jonction de la Tunisie, de l’Algérie et de la Libye. C’est d’ici que les chameaux chargés partaient vers l’ouest en direction de Tombouctou, vers le sud en direction de Ghat et de Bornu ou vers le nord, en direction des ports de la Méditerranée.
La ville est devenue un point de rencontre essentiel entre les civilisations, et ses habitants berbères (connus localement sous le nom d’Amazighs), les Ghadamisa, étaient très vénérés.
Elle a ainsi prospéré jusqu’à l’abolition de l’esclavage, se soumettant à la domination ottomane et connaissant des intermèdes d’occupation italienne et française au début du XXe siècle. Dans les années 1980, une pénurie d’eau et l’absence d’infrastructures sanitaires modernes ont conduit Mouammar Kadhafi à ordonner la construction d’une nouvelle ville à proximité.
… et la grande rénovation

Aujourd’hui, le vieux Ghadamès n’a plus de résidents permanents, même si, pendant l’été, sa supériorité environnementale par rapport aux immeubles d’appartements en béton de la nouvelle ville attire un flot régulier d’Amazighs et de Subsahariens, qui reviennent pour entrer dans ses mosquées et ses salons de thé et savourer sa beauté fraîche.
Les allées couvertes permettent de se reposer de la chaleur, qui atteint jusqu’à 55°C en été.
Ils viennent également s’occuper des 121 jardins familiaux, qui sont irrigués par un système complexe de canaux provenant de puits artésiens et de la source souterraine d’Ain al-Faras – l’origine légendaire de l’oasis.
Dans les jardins, à l’ombre des palmiers dattiers et des arbres fruitiers, j’ai admiré les murs extérieurs crénelés de la ville. La teinte ocre naturelle des briques de terre est bordée de blanc, surmontée d’ouvertures triangulaires et d’épis de faîtage extravagants, tous deux typiques de l’architecture saharienne à travers le Maghreb.
L’intérieur des maisons est décoré de façon vivante, avec des casseroles en cuivre et des miroirs qui réfractent la lumière autour de la pièce. Ce monde surélevé était le domaine des femmes qui, limitées à une seule rue principale en contrebas, conformément à la coutume islamique locale, passaient leurs journées à cuisiner, à coudre et à entretenir des relations sociales tout en faisant le guet pour les caravanes qui approchaient. Certaines y dormaient même pendant les chaudes nuits d’été.

Alors que le soleil impitoyable tape sur cette géométrie blanche et lumineuse, bordée de palmiers verts touffus, il semble évident que les meilleures affaires sont réservées aux hommes, dans leur monde souterrain, frais et ombragé. Mais ce que les hommes et les femmes partageaient, c’était la beauté, l’intelligence et la complexité de cette remarquable ville abandonnée, perdue dans les profondeurs du Sahara, mais dont on peut encore profiter – par intermittence – aujourd’hui.
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