Soixante années de carrière et d’engagements, c’est le nombre d’années que le grand saxophoniste Manu Dibango a mis au service de tout un continent. C’est dans un communiqué sur sa page Facebook que sa famille avait annoncé son décès causé par le Covid-19 alors qu’il était âgé de 86 ans. Vétéran des musiciens africains en France, il aura marqué son époque avec de la bonne mélodie pour une écoute sensationnelle.
Manu Dibango savait être un artiste au sens large du terme. Il jouait de la guitare,
était vibraphoniste, joueur de marimba, pouvait aussi jouer de la mandoline et, récemment, du balafon. Il était également chanteur, arrangeur et chef d’orchestre. Le compositeur de Soul Makossa (1972), le titre avec lequel il avait acquis une notoriété mondiale, résumait tout cela en une formule, lancée dans un de ces puissants éclats de rire qu’il semait à la volée : « Je me contente de faire de la musique. »

Celui qui se faisait appeler « Papa Manu » a vu le jour en en 1933 à Douala au Cameroun. Né d’une mère couturière et d’un père fonctionnaire qui l’envoie en France à 15ans pour continuer ses études.
Après le collège à Saint-Calais, il fréquente le lycée de Chartres, où il apprend le piano avec un des enseignants. C’est pour lui l’âge des premières cigarettes et surtout la découverte du jazz, grâce à un compatriote de quatre ans son aîné, rencontré en colonie de vacances, à Saint-Germain-en-Laye, Francis Bebey (1929-2001), lui aussi futur musicien camerounais notoire. Celui-ci lui fait aimer Duke Ellington. Ils créent ensemble un trio dans lequel Dibango tient mandoline et piano. Après un premier album, Saxy Party, constitué de reprises et de compositions, l’année 1972 marque le départ d’une nouvelle vie. En 1973, Soul makossa permet à l’artiste de triompher à l’Olympia tout en lui ouvrant les pistes de danses africaines et les ondes aux États-Unis.
Avec le temps, Manu s’illustre davantage en tant que musicien et artiste engagé pour l’Afrique. Nommé artiste de l’Unesco pour la paix en 2004, Manu Dibango a souvent mis sa notoriété au service de combats : lutte contre la faim dans le monde (Tam-Tam pour l’Ethiopie), libération de Nelson Mandela et liberté d’expression, réchauffement climatique. Son métier de musicien le mettait toujours autant en joie et il était occupé à préparer un projet autour du balafon. « Je suis passionné et curieux », résumait-il, pour indiquer que raccrocher n’était pas à l’ordre du jour pour lui.
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